Éduquer vient du latin « educare », produire, élever. On dit d’ailleurs des parents non seulement qu’ils éduquent, mais aussi qu’ils élèvent leurs enfants. Et cependant l’éducation se distingue radicalement de l’élevage parce qu’il ne s’agit pas seulement de soigner les enfants, comme on soigne les bêtes, mais de les élever au sens symbolique du terme, c’est-à-dire s’occuper de l’éveil et du développement de leur esprit.
Lors du premier semestre nous avons vu que le propre de l’être humain était d’être un être de parole, capable de situer son existence dans la dimension du langage, du symbole. Mais cela ne peut se faire « par nature ». Il est essentiel que le petit d’homme soit introduit à la dimension symbolique de son existence. Pour être humain, il ne suffit donc pas de naître dans un corps d’homo sapiens, il faut encore être initié ce que veut dire être un être humain.
Homo sapiens, en naissant, est encore vide de « sapientia », la sagesse. Après être le fruit de l’union des patrimoines génétiques du père et de la mère (notre nature biologique), le petit d’homme, pour devenir « sapiens », doit encore recevoir le symbole de son humanité (notre seconde nature, proprement humaine). L’humain naît deux fois, dans la chair, et dans l’esprit, c’est-à-dire génétiquement et symboliquement. Et l’éducation est ce processus de transmission par lequel nous sommes introduits à la dimension symbolique de notre existence.
Alors l’éducation est-elle nécessairement émancipatrice ? En apprenant à parler, l’être humain gagne-t-il toujours nécessairement en sagesse, en intelligence, en liberté ? Et bien non, ce n’est pas si simple. Car le symbole peut devenir une prison pour l’humain. Nous devrons donc nous demander comment différencier la mauvaise éducation, qui relève du simple dressage, de l’aliénation mentale, et nous fixe dans l’enfance, et la bonne éducation, qui permet à l’être humain de s’affirmer comme un être pensant, autonome, maître de sa vie et acteur de sa culture.